Hour Of Witches

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La fraîcheur du ciel nocturne, parsemé d'étoiles brillantes et de quelques nuages vaporeux, avait acceuilli le bruit de deux cris distinct. Deux cris bambins, cristallins et puissants. Cette nuit-là, dans cette modeste demeure, étaient nées Ruqayyah et Nyméria. Vivants au beau milieu d'une cité, la famille Nefer-Hedjet était respectée pour être des marchands respectueux et consciencieux. Ils tenaient une petite échoppe qui vendait des tissus et des étoffes en tout genre. Ils ne faisaient pas partie des plus riches, mais ne vivaient pas non plus dans la pauvreté. Ils n'étaient pas à plaindre et menaient une vie tranquille, paisible. Leur père avait espéré un garçon, afin de perpétuer la lignée, mais il n'en avait pas pour été malheureux de voir naître deux filles. Leur mère avait eu une grossesse difficile, elle avait été obligée de rester alitée durant de nombreux mois, afin de ne pas perdre les bébés. La décision de ne pas avoir d'autres enfants avait alors été prise, malgré l'absence d'héritier de sexe masculin.

Dans d'autres familles, cela aurait été bien différent, mais le père était un homme généreux et sage. Il était déçu, certes, mais pas au point de perdre tout intérêt pour ses filles. Il avait été très heureux de les voir naître, un bonheur teinté de déception, car il savait que son commerce devrait être remis à quelqu'un d'autre. Sauf si leur vie était bénie d'un miracle. Laquelle des deux sœurs était née en premier ? La réponse serait différente en fonction de la soeur à laquelle la question sera posée. Téos, le père, riait souvent de voir les deux jumelles se disputer gentiment afin de savoir celle qui était née avant l'autre. Les deux soeurs n'avaient jamais manqué de rien, elles avaient été aimées de la même manière et avaient découvert la vie ensemble. Au début, elles ne s'étaient pas lâchées, refusant d'être séparées l'une de l'autre. Elles se ressemblaient tellement qu'on aurait dit le miroir l'une de l'autre.

En grandissait, leurs différences s'étaient révélées, leurs physiques avaient évolués et il était devenu bien plus facile de les différencier. Ruqayyah était la plus renfermée des deux, la plus solitaire, tandis que Nyméria était la casse-cou, celle qui faisait le plus de bêtise. Elles se soutenaient continuellement, faisant part d'une loyauté sans faille l'une envers l'autre. Il semblait exister entre elles, un lien mystique et indéfinissable. Elles semblaient se comprendre rien qu'en se regardant, comme si elles étaient douées de télépathie. L'âge venant, leur lien s'était renforcé, bien qu'elles avaient choisi des chemins différents. Nyméria s'était aventurée sur un chemin autre que celui de sa sœur, non pas par envie de faire les choses différemment, mais parce que c'était ce qu'elle voulait. Et la jeune fille se refusait rarement ce dont elle avait véritablement envie.

Leur famille vénérait les dieux égyptiens, leur rendant hommage le plus souvent possible, priant afin d'obtenir leur bénédiction. C'était durant l'une de ces cérémonies que Nyméria avait rencontré Sohan. C'était un garçon âgé de deux années de plus qu'elle. Leurs pères se connaissaient depuis leur jeunesse et le père de Sohan possédait un commerce de pierres précieuses. Nyméria était tombée amoureuse au premier coup d'œil, elle qui se targuait d'être intouchable, voilà qu'il avait été l'exception à sa règle. Ils s'étaient tournés autour durant de nombreuses années, se cherchant, se fuyant. Un manège impossible qui avait sans doute dû rendre chèvre, leurs familles. Mais ils avaient toujours eu ce besoin de se provoquer, de voir ce dont l'autre serait capable. Finalement, âgés respectivement de 23 années pour elle et 25 années pour lui, ils avaient fini par officialiser leur étrange relation par des fiançailles. Nyméria avait connu là, les années les plus heureuses de sa vie. Le mariage s'était déroulé l'année suivante, les unissant pour la vie, sous le regard des dieux. Nyméria avait laissé de côté sa fougue, s'était rangée dans le rôle de la femme mariée au foyer, qui aidait son mari dans son travail. Et finalement, cela ne la dérangeait pas, car elle aimait éperdument Sohan. Elle pensait sincèrement qu'il était son âme-sœur, celle choisie par les dieux pour être son partenaire idéal. Ils se comprenaient si bien qu'ils étaient comme deux faces d'une même pièce.

Mais la guerre des pestes avait débuté quelques années après le début de la guerre, leurs deux familles s'étaient retrouvées obligées de quitter leur cité natale. Leur transformation avait surpris tout le monde également, ignorant ce qu'ils avaient fait pour mériter la bénédiction des dieux, mais ne cessant de les remercier pour le cadeau qu'ils leur avaient octroyés. Nyméria et Sohan s'étaient retrouvés avec leurs familles, se protégeant les uns les autres, du mieux qu'ils le pouvaient. Le temps était passé, amenant avec lui des drames, de l'obscurité et de la peur. Les jours heureux étaient bien loin désormais. Et puis Nyméria était tombée enceinte. Pour elle, cela avait aussi terrible que joyeux. Elle ne se voyait pas avoir un enfant dans ces conditions et pourtant, elle avait rêvé de pouvoir porter un bout de Sohan en elle. Leur enfant. Malgré la situation, l'annonce de sa grossesse avait amené du baume au cœur de leurs familles et Nyméria s'était beaucoup raccrochée à Sohan, mais également à Ruqayyah, sa sœur bien-aimée.

Hélas, la jeune femme semblait souffrir des mêmes faiblesses que sa mère et sa grossesse l'avait obligée à cesser de s'épuiser, l'idéal aurait été de rester dans un endroit chaud et calme, mais ce n'était pas possible. Nyméria voulait croire en un avenir plus radieux et ils avaient entendu les rumeurs d'une ville protégées des dieux, Salem. Ils s'étaient donc mis en route, désireux de trouver cette ville salvatrice. Ils faisaient face aux dangers qui se dressaient devant eux, mais chaque épreuve était plus dure que la précédente. Alors, lorsqu'ils tombèrent dans une embuscade, le monde de Nyméria s'effondra. Les familles furent séparées, elle perdi Sohan, ignorant s'il s'en était sorti vivant ou non. Sa sœur était restée avec elle, elles s'étaient mutuellement protégées, soudées. Hélas, le bébé n'avait pas supporté l'utilisation des pouvoirs de Nyméria et elle l'avait perdu également. Des semaines durant elle avait été telle un zombie, reclue dans son monde intérieur, se demandant comment elle avait pu tout perdre ainsi.

Les mois étaient passés avant qu'elles ne finissent par trouver Salem et Nyméria avait fini par reprendre pied avec la réalité. Avait-elle seulement le choix si elle voulait protéger la seule personne qui lui restait ? Retrouvant sa fougue et son caractère enflammé, elle conserve toujours cette part d'ombre en elle, ce sérieux, cette façade glaciale dissimulant tous les souvenirs douloureux. La voie de protecteur s'offrit à elle, lui donnant l'opportunité de penser à autre chose, d'évoluer vers un objectif qu'elle pourrait accomplir sans faille. Alors que Ruqayyah s'en allait dans la forêt, elle était restée en ville, désireuse de protéger ceux qui étaient innocents.